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“Excellence, Monsieur le Président de la République, 

Le Collectif des Féministes du Sénégal vous présente ses hommages et vous adresse cette lettre comme un cri du cœur, un ras le bol face aux meurtres récurrents des femmes.  La situation des femmes au Sénégal est de plus en plus précaire voire mortelle avec ces nombreux FÉMINICIDES!

Le Sénégal ne peut plus être le pays de la TERANGA, une terre d’hospitalité, si ses propres citoyennes subissent des violences quotidiennes. Il devient une terre d’hostilité où la vie des femmes et des filles n’a aucune valeur à cause de la facilité avec laquelle on peut tranquillement décider du sort de la vie d’une femme et cette situation est reconfortée par le silence de nos autorités. 

SÉNÉGAL,  UN PAYS VIOLENT POUR LES  FEMMES!

Depuis quelques mois, voire des années, nous assistons à des cas extrêmes de violences contre les femmes et les filles. Le viol, l’inceste et les meurtres récurrents viennent s’ajouter aux multiples formes de violences que les femmes subissent aussi bien dans l’espace public que privé.

Des femmes ont quitté leurs pays rêvant d’une belle vie au pays de la teranga et y ont trouvé la mort. Lotaly Mollet, Essi Akoli, Josee Christiane Tielemans…victimes de la masculinité toxique, d’une société où tuer une femme est devenue la chose la plus banale. Des corps dont la disparition tragique n’émeut ni les dirigeants et dirigeantes de ce pays ni les autorités religieuses. La vie humaine n’est-elle pas sacrée? 

Le corps des femmes n’est pas un objet que des hommes sénégalais peuvent utiliser et s’en débarrasser comme un vulgaire mouchoir. Alors, nous disons DOYNA! L’Etat à travers le Ministre en charge de la Femme, de la Famille et de la protection des enfants se doit de protéger l’intégrité physique et morale des femmes et filles du Sénégal.

LA VIE DES FEMMES N’EST PAS UN FAIT DIVERS !

Le Collectif des Féministes du Sénégal, à l’instar d’autres organisations de la société civile, ne cesse de s’indigner face à ces situations et de faire remarquer l’absence d’une position ferme de nos autorités contre une telle situation.  Nous nous sentons seules dans ce combat qui devrait être celui de tous et toutes. Notre ministère de tutelle est très souvent aphone devant le nombre important de femmes tuées, aller visiter les familles des victimes ou les survivantes ne règle pas vraiment le problème. Les cas de viol et de meurtre de femmes sont devenus des faits anodins et ne semblent émouvoir personne ; surtout la classe dirigeante sénégalaise dont vous êtes le chef de file. 

Excellence, les données statistiques font froid dans le dos.

Rien que sur la période de janvier à novembre 2019, quatorze (14) cas de meurtre de femmes ont été repertoriés par le Comité de Lutte contre les Violences faites aux Femmes. Une liste qui ne cesse de s’allonger.

Depuis le début de l’année 2022, nous avons recensé plus de dix (10) meurtres de femmes et de filles tuées sauvagement. Rien que les deux dernières semaines du mois d’octobre, nous avons enregistré les meurtres d’au moins quatre (4) femmes. il est malheureux de remarquer que ces féminicides n’ébranlent que les femmes.

En juillet à Touba, la jeune Ndèye Diop est découverte dans un puits, son copain Abdourahmane MBacké l’avait poignardée avant de l’étrangler et les parents de la victime avaient décidé de ne pas porter plainte.  On peut comprendre aisément que le nom de l’assassin lui a pleinement profité. 

La semaine du 18 Octobre 2022 est la plus meurtrière de cette année. En effet , à  Matam, O. Barro âgée de 19 ans a été abattue d’une balle dans la tête par son mari pour avoir demandé le divorce, un droit reconnu au Sénégal. 

À Kaolack, Fatou Samb âgée de 17 ans a été retrouvée mutilée. Cette adolescente sortie de l’école a été enlevée, violée, tuée sauvagement et jetée dans la forêt.

Ce lundi 24 Octobre, Oumar Sano a tenté d’éventrer sa femme parce qu’elle aurait demandé le divorce.

Abass Sow a tenté d’égorger sa deuxième épouse, sauvée de justesse par les voisin·e·s, sous prétexte qu’elle avait refusé de rejoindre le domicile conjugal. 

Nous avons peur Monsieur le Président !

L’UNIVERSITÉ SÉNÉGALAISE EST AUSSI DEVENU UN MILIEU DANGEREUX POUR LES ÉTUDIANTES !

Les violences faites aux femmes vont jusque dans nos  temples du savoir comme à l’université. De Dakar à Saint-Louis en passant par Thiès et Ziguinchor, les étudiantes vivent dans un harcèlement constant et ne sont pas épargnées des féminicides.  Le corps de Seynabou Ka Diallo préalablement portée disparue a été découvert dans une valise non loin de l’Université Gaston Berger. Son copain, étudiant, avoua son meurtre. 

Les sénégalaises vivant a l’étranger ne sont également pas épargnées de ces féminicides, plusieurs d’entre elles considérées comme des propriétés privées  de leurs maris sont tuées par ces derniers. Fatoumata Baldé au Maroc, Haby S. et Nafissatou Diedhiou en France, Maguette Ndiaye en Espagne… Aux États-Unis non plus les sénégalaises ne sont pas en sécurité. 

Un taux de croissance économique de 5,5% ne peut signifier grand chose pour une femme qui ne peut vivre en sécurité ou qui n’a pas les mêmes droits que son mari sur son enfant.  

À Guédiawaye, F. Cissé  a failli rendre l’âme après avoir reçu plus de seize (16) coups de couteau de son mari sous prétexte qu’elle était sortie sans son autorisation. 

Monsieur le Président de la République, notre société serait-elle en guerre contre ses femmes ? C’est la question que nous sommes tentées de nous poser face au silence assourdissant de nos autorités.

Excellence, votre silence sur le sort des femmes du Sénégal nous inquiète, nous révolte et nous surprend. Ces femmes ont aussi contribué à vous porter à la tête de ce pays.

L’adoption en 2020, de la loi criminalisant le viol n’a rien changé aux violences sexuelles commises sur les femmes, les faits sont souvent requalifiés. Au-delà de l’adoption, il faut que les lois s’appliquent pour faire cesser l’impunité.

VOUS AVEZ DIT CONFERENCE SUR LA MASCULINITÉ POSITIVE?

Notre pays est en contradiction avec lui-même. L’organisation du sommet sur les masculinités positives en est une des preuves parfaites. On ne pourrait parler de masculinités positives sans le respect des droits humains, la sécurité des femmes et la lutte contre l’impunité face aux violences à leur encontre. 

Notre Collectif est d’autant plus inquiet, que notre pays se targue au niveau international d’être un pays de droits et de libertés, un pays où les femmes sont respectées et protégées.

Excellence, la lutte contre l’impunité pour les féminicides, les violences sexuelles et économiques faites aux femmes, constitue le socle de la masculinité positive

Au moment où le Sénégal accueillera des invités venus du monde entier, avez vous pensé Monsieur Le Président à ce que les expert·e·s penseront de la situation des millions de femmes et filles sénégalaises et du silence de leur hôte?

Il urge de prendre des mesures sévères pour assurer la sécurité et l’intégrité physique des femmes et filles qui sont des citoyennes de ce pays. 

PRENDRE DES MESURES CONTRE LA CULTURE D’IMPUNITÉ MASCULINE !

La lutte pour le respect des droits de la femme est une composante essentielle de la bonne gouvernance et de la démocratie. On ne peut pas continuer à bafouer les droits de 52% de la population et espérer être pris au sérieux par nos pairs dans le monde. Nous ne voulons plus être célébrées, chantées, fêtées le 08 mars puis tuées les 364 jours qui restent dans le silence le plus total.

Pour que ces mesures soient effectives il est primordial de mettre en place un fonds d’appui pour les victimes de violences sexuelles et sexistes et leurs familles. Souvent, les familles des défuntes ne peuvent ni payer un avocat ni élever correctement les orphelin·e·s que ces femmes laissent derrière elles.

Par ailleurs, il est nécessaire de renforcer le dispositif d’accueil, d’orientation et d’appui aux victimes de violences sexuelles et sexistes sur toute la chaîne et de documenter régulièrement les cas de violences sexuelles et sexistes et de féminicides. Des mesures adéquates pour leur diminution et in fine leur arrêt devraient s’en suivre. Cela passe sans nul doute par l’application de la loi dans toute sa rigueur et une politique zéro clémence pour les auteurs de tels crimes. 

Réagissez Monsieur le Président ! Votre silence renforce la discrimination et l’impunité envers les femmes et les filles de ce pays face aux violences masculines. 

Que l’âme des victimes repose en paix. Que Justice leur soit rendue.  Que leurs noms ne tombent point dans l’oubli. 

Woury Mane, Yoba Baldé, Ndioba Seck, Khady Seye, Aminata Ka, Yacine Sane, Bineta Camara, Lobe Ndiaye, Fatou Kiné Gaye, Khady Badiane, Athia Ba, Lena Gomis, Dieynaba Deme…la liste est encore longue. 

WÓOY WALLOO!

PRÉSIDENT NOO NGI JEEX! 

WALLU NU!

À Son Excellence Monsieur Macky Sall, Président de la République du Sénégal

LE COLLECTIF DES FÉMINISTES DU SÉNÉGAL

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